Voici une chanson historique des cosaques du Don, datant de la première guerre mondiale ~ 1914 ~ 1916.
Le vidéogramme ci-dessous, fut enregistrée en septembre 2020 pour Vek (Le siècle,) un site qui présente de la musique folklorique des cultures traditionnelles des différentes régions de la Russie.
les interprètes en sont : Nikolaï Sakharov, Ilia Tchekounov, Alexandre pereslepine, Aleksei Prokhorov, Nikolaï Chantarenkov, Rostislav Kononenko, Vladimir Iakimov, Maxime Sassov, Evgueni Bagrintsev, Ivan Sakharov, Mikhail Tchilakhsaev, Serguei Sterlikov, Ivan Lapine, Nikolai Kozlov, Mikhail Zamorine, Nikolaï Triphilov, Dmitri Matveenko, Alexei Mikhaltsov, Fedor belooussov.
Par les monts des Carpates, la neige tourbillonnante,
L'hiver, crépitent les froids puissants,
Nous attaque, le maudit allemand,
Sur la croix d'or, sur notre nation,
Et mon beau brun, brun, aux sourcils bruns
Se bat pour sa foi contre les Germains
les Germains voulaient que nos cosaques
Aillent servir leur trône,
Mais nos Cosaques, glorieux sabreurs,
Ne sont pas allés servir leur trône,
Se mirent à jouer les trompettes, les trompettes, les tambours,
les portes s'ouvrirent, est sorti l’infidèle,
La bataille s'est enflammée, une bataille sans pitié,
S'est mis à couler en rivière, le sang brûlant,
Le Cosaque demande à Dieu, prie et pleure,
Que nos têtes ne soient pas, sur ce tertre, couchées,
sur ce tertre, de gais oisillons,
Pour leur foi, jouent joyeusement !
Cette chanson populaire casaque daterait de l’année 1783 et raconte dans sa première version l’affrontement des cosaques du Don avec la cavalerie Nogaïs. Elle a dû résonner également dans le Paris de 1814.
- Durant la guerre civile, elle serait devenue la chanson de la bataille qui eu lieu en janvier 1920, entre la cavalerie cosaque blanche du général Pavlov et la première armée de cavalerie rouge de Boudionov, sur le fleuve Manytch, dans le sud de la Russie. Le nombre de cavaliers cosaques, tant du côté blanc que du côté rouge s’élevait réellement à prés de quarante milles hommes. Les blancs perdirent cette bataille et durent reculer à travers la steppe gelée vers Novorossiisk pour, au mois de mars de la même année, une terrible traversée de prés de300 kilomètres, afin atteindre la Crimée.
- Il existe un couplet qui fut chanté par les cosaques restés fidèles au gouvernement provisoire : Aussi, commémorerons frères, nos frères fidèles /Nos frères en Christ du Terek et du Kouban. /Le Juda Trotski et le JudaSverdlov, /Ont Crucifiés lâchement sur la croix, la mère-Russie.
- Cette chanson fut également l’une des préférées de l’anarcho-communiste, Nestor Makhno, qui devait la ressasser dans son exile français, entre son travail de peintre en bâtiment, son logement de Vincennes et le café-tabac où il venait les dimanches, jouer au tiercé.
Il fait bon, frères, il fait bon,
Il fait bon vivre, frères !
Avec notre ataman*, On n’a pas à s'apitoyer ! (bis)
Ceux que l’Ataman choisi, il les connait.
- Escadron à cheval ! Et moi, on m’a oublié.
Il leur est échu la destinée cosaque et la liberté,
Moi, il m’est échu la terre poussiéreuse et brûlée.
Il fait bon, frères, il fait bon,
Il fait bon vivre, frères !
Avec notre ataman, On n’a pas à s'apitoyer ! (bis)
Et la première balle, et la première balle,
Et la première balle, mon cheval à la patte, blessa.
Et la seconde balle, et la seconde balle,
Avec notre ataman, On n’a pas à s'apitoyer ! (bis)
Ma femme s’attristera,
Épousera un autre,
Un de mes camarades, elle m’oubliera.
Dommage seulement pour la liberté
Dans le vaste petit pré,
Dommage pour mon cheval isabel et mon sabre aiguisé.
Il fait bon, frères, il fait bon,
Il fait bon vivre, frères !
Avec notre ataman, On n’a pas à s'apitoyer ! (bis)
Et la pluie froide, et la pluie froide,
Et la pluie froide, mes os, lavera.
Et le noir corbeau, et le noir corbeau,
Et le noir corbeau, mes cheveux, béquètera.
(Variante du dernier couplet chanté par les cosaques du Don)
Mes boucles blondes, mes yeux clairs,
Les herbes folles et l’absinthe sauvage envahiront.
Mes os blancs, mon cœur fier,
Rapaces et corbeaux, dans la steppe disperseront.
Il fait bon, frères, il fait bon,
Il fait bon vivre, frères !
Avec notre ataman, On n’a pas à s'apitoyer ! (bis)
Traduction : Sarah P. Struve.
* - Le terme « Ataman » d’après certainnes versions, vient du terme Guéîtman lui-même dérivé du mot anglo-saxon et scandinave ; « Headman » qui signifie « capitaine » Ce mot aurait transité par la Pologne avant de s’encrer en Russie. Selon une autre version, Ataman est issu de deux mots turcs, « ata » qui signifie « père » et « taman » ou « temen » qui veut dire « dix mille." C’est ainsi que les cosaques désignent le chef de la « stanitsa – village » élut par eux, qui, pendant les périodes de service et de guerre, esten même tempsle commandant du régiment formé par les hommes de la stanitsa.
Iouri Chtcherbakov est né en 1972, Il est issu d’une lignée de cosaques du fleuve Khoper. Chansonniers de père en fils. Iouri Chtcherbakov a fait de nombreuses recherches ethnographiques sur la chanson cosaque, qu’il a aidée à faire renaitre.
Voici un extrait d’un article sur cet accordéoniste-chanteur d’exception : "Dans le film de Nikita Mikhalkov, «Soleil trompeur 2- La citadelle » il y a une scène où des soldats soviétiques d’un bataillon disciplinaire, partent à l’attaque d’un fort allemand, avec seulement des bâtons dans les mains, au son d’un accordéoniste chantant et jouant ; cet accordéoniste est interprété par Iouri Chtcherbakov. Dans le milieu du cinéma russe, circule une légende disant que le cosaque du Don, Iouri Chtcherbakov a envoyé à Mikhalkov, un peu comme une bouteille à la mer, un CD avec ses chansons. Ce disque a trainé longtemps dans la voiture du metteur en scène et puis, un jour, Mikhalkov a écouté quelques-unes de ses chansons, tout en roulant. En réalité, Chtcherbakov n’a pas envoyé son disque à Mikhalkov et ce dernier découvrit les interprétations de l’accordéoniste, par hasard. En fait lorsqu’on appela Chtcherbakov de Moscou, il pensa que c’était un canular.
- Avec l’ensemble « Stanitsa,» où je travaille, nous étions en route pour une tournée à Astrakhan - raconte Chtcherbakov – mon portable sonna et une jeune fille me dit à l’appareil qu’elle appelait de la part de Mikhalkov, j’ai tout de suite pensé que c’était une blague et j’ai répondu très sérieusement que nous étions en train de manger, de me rappeler plus tard. J’ai pensé qu’elle ne rappellerait pas, mais elle a rappelé…
Iouri Chtcherbakov a commencé à jouer de l’accordéon, alors qu’il était enfant dans une école musicale de la ville de Voljsk en République deMari El, mais laissa tomber au bout d’un an. Plus tad il a essayé de faire de la musique, alors qu’il était au lycée à Volgograd.
- C’est mon grand-père qui m’a appris à jouer de l’accordéon, nous vivions alors dans la circonscription de Novoanninsk et c’est mon autre grand-père qui m’offrit mon premier accordéon. Je jouai les chansons à l’oreille, - se souvient-il. Chtcherbakov a commencé à jouer dans des ensembles folkloriques, alors qu’il n’avait pas encore fait son service militaire. Il partait en expédition dans la région, avec ses amis, afin de collecter des chansons populaires. - Un vieux cosaque m’a donné une chansonà contrecœur. Je lui ai bêché son potager, réparé son portail : Ainsi, peu à peu, il s’est mis à parler et s’est mis à chanter. Je suis retourné le voir plus d’une fois, après, - se rappelle Chtcherbakov. Le clou du programme de Chtcherbakov, ce sont les romances féminines. - Aucune femme ne les jouera, ni ne chanteraavec autant de ferveur, que Chtcherbakov – affirme le chef de chœur de l’ensemble«Stanitsa,»Alexandre Kiyachko. – Chez lui, c’est l’âme qui chante.(…)"
Lors du concert d’Odessa, I. Chtcherbakov présenta « La nuit est tombée (Tango d’adieu) » de cette façon : « Ainsi donc frères, vous savez que le 2 février, c’est le 70° anniversaire de la bataille de Stalingrad, je voudrais avec ces chansonы, rendre hommage à nos pères et grand-pères ayant combattu durant la Grande guerre patriotique, aussi, j’aurais voulu vous chanter tout d’abord « La nuit est tombée -Tango d’adieu. » Cette chanson a été retranscrite de Piotr kouzmitch Kozerev de la Stanitsa Baskovskaïa pas loin de la stanitsa Liochenskaïa, de la région de Rostov. Il racontait qu’avec cette chanson, « nous avons accompagnés nos pères qui partaient au front. »
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Спустиласьноч / La nuit est tombée (Tango d’adieu ~ Прощальное танго) Romance Cosaque
La nuit est tombée
Au-dessus des érables endormis
La lune voguait
Au-dessus de la rivière endormis
Mais, hors tes yeux
Espiègles et amoureux,
Je ne vois, en ce soir,
Rien devant moi.
Mon aimée,
Je te chante cette chanson…
Mon aimée
Proche est l’heure de notre séparation
Mais à l’heure du rendez-vous
Avant la route lointaine
Mon aimée, serre-moi dans tes bras,
Embrasse-moi pour la dernière fois.
Pour la dernière fois,
Je me tiens devant toi,
Pour la dernière fois,
Je vois tes yeux.
Tes yeux tristes
Et, languis d’être séparés
Et, le long de ta joue, s’est mise à couler
Une larme esseulée
L’amour est passé,
Comme sont passées les jeunes années,
L’amour est passé,
Avec un autre, à cette heure, tu es.
Mais à l’heure du rendez-vous
Avant la route lointaine
Mon aimée, serre-moi dans tes bras,
Embrasse-moi pour la dernière fois.
Traduction : Sarah P. Struve
(Cette traduction est dédiée à tous ceux qui sont tombés en défendant leur langue et leur culture, ainsi qu’a leurs proches. Aux défenseurs de la Novorussie.)
« УходилимыизКрыма ~ Ukhodili my iz Kryma ~ Nous quittions la Crimée » est une romance dont le texte a été écrit à la fin des années 20 du XX° siècle par un jeune officier cosaque, ayant immigré à la fin de la guerre civile; Nikolaï Touroveroff (1899 Oblast' de Rostov - 1972 Paris). Voici ce qu’en dit Natalia Beliakova sur le site « Росийское казачество ~ Rossiiskoe kazatchestvo ~ Cosaques de Russie » « Essenine du Don,» « chantre des cosaques de Russie » - Longtemps, ces appréciations flatteuses du talant de Nikolaï Touroveroff, ne raisonnaient qu’à l’étranger. Et si « le poète en Russie, est plus qu’un poète, » il est alors difficile d’estimer le rôle de ce cosaque du Don dans la vie de ceux qui durent se retrouver dans une émigration obligée et douloureuse.
Un rassembleur infatigable de l’héritage cosaque et un gardien dévoué de ses traditions, symbole pour l’européen, du cosaque russe; Voilà seulement quelques traits du portrait de Nikolaï Touroveroff, qui a su dans sa créativité, refondre sa douleur personnelle en un âpre élixir dilué de larmes, des traditions ethniques et de la fierté cosaque. En novembre 1920, lorsque dans la rade de Sébastopol, on porta à bord d’un bâtiment, le lieutenant du régiment Ataman, gravement blessé, accompagné de son épouse et de son frère cadet, il était l’un des derniers cosaques des cinquante mille du corps du Don du général Vrangel, à embarquer. Savait-il qu’il voyait sa patrie pour la dernière fois ? Nikolaï Touroveroff va continuellement revenir dans sa poésie, au tragisme de l’exode des gardes-blancs. La Crimée fut un tournant non seulement pour sa destinée d’homme, mais également pour sa créativité. Pour ce jeune officier à peine sortie de l’école des cadets du régiment Ataman, de ne pas tomber dans un désespoir sans fond, l’aida le désir de mettre en rimes, de conserver pour les contemporains et, peut-être aussi, pour leurs descendants, ce qui s’appelle « mémoire nationale. » Se sauvant par sa créativité, par elle, il exaltait aussi les autres. A l’étranger, il subsistait, faisant les emplois les plus obscures, d’abord en Serbie, puis en France. Engagé dans la légion étrangère, il combattra l’envahisseur fasciste en Afrique du nord.
En 1928, Touroveroff présente son premier recueil de poésie sous un nom simple et contenant : "Путь~ Pout’ ~ La voie" Dans ce recueil, il y avait des textes sur cette déchirure fatale, que fut la Crimée, pour les blancs (dont le texte de "Nous quittions la Crimée".»)Le poème - ironie du destin - sans le nom de l’auteur, était également populaire dans la Russie soviétique et le thème sur l’adieu d’un officier de la garde blanche à sa monture, a même trouvé un reflet au cinéma : En 1988, sort sur les écrans : «Служилидватоварища~ Slougyli dva tovarichtchia ~ Deux camarades, servaient » Le héros du film ; Broussentsov (interprété par Vladimir Vissotski) n’arrive finalement pas à abattre son cheval, préférant se tirer une balle dans la tempe.»
Voici un vidéogramme où Alexandre Smyrnov interprète cette romance qu'il a lui-même mis en musique.
Nous quittions la Crimée Au milieu du feu et de la fumée,
Depuis la poupe, en visant mal, Je tirais sur mon cheval.
Et lui, il nageait, n’en pouvant plus,
Derrière la poupe élevée, Ne sachant pas, ne croyant toujours pas
Que, ses derniers adieux, il me faisait.
Combien de fois, une seule sépulture, Dans les combats, nous était destinée.
Perdant ses forces, mon coursier nageait Toujours, croyant en ma fidélité.
Mon ordonnance ne tirait pas à côté, L’eau avait rougie légèrement…
La côte de la Crimée s’éloignant, Jamais, je ne pourrai l’oublier.
Voici un chant traditionnel des cosaques du Don interprété par Vladimir Skuntsev et son ensemble "Казачий круг - kazatchiyi krug – le cercle cosaque" Skuntsev est un artiste autodidacte, interprète de chansons folkloriques. Il est connu pour son travail d’archive du folklore cosaque. Vladimir Skuntsev crée l’ensemble "Kazatchiy krug " à Moscou en 1986, le répertoire de l’ensemble est constitué de plus de 300 chansons des régiments cosaques du Don, du Kouban, du Terek, de Zaporojie, de l’Oural, de Sibérie ainsi que de la Volga. La collecte de ces chants se fait Lors d’expéditions de recherches régulières effectuées par les membres de l’ensemble qui essayent d’être au plus près des traditions du chant cosaques, gardant précieusement la musicalité et le dialecte des chants originaux.
Le texte de cette romance cosaque est issu d’un poème de A. Mоltchanov, il fut écrit en 1838, à l’époque des guerres caucasiennes, sur le « Selistrïa, » navire amiral de la flotte de la mer noire, aussi il est probable que Maltchanov était un officier de marine. Des bruits courent disant que l’officier poète mourut lors d’un débarquement en Abkhazie.
La musique fut composée en 1840, par Nicolaï Devitté.Il existe plusieurs versions textuelles de cette romance. Ainsi le fleuve Don est souvent remplacé par d’autres noms de fleuves tel le Boug, ou le Danube (chez les russes de Bessarabie.)
Ce n’est pas pour moi que viendra le printemps,
Ce n’est pas pour moi que le Don débordera,
Et le cœur d’une fille se mettra à battre follement,
Exultant de sentiments – ce n’est pas pour moi.
Ce n’est pas pour moi que se lèvera la lune,<
Éclairant, dans les vallées, les bois,
Et un rossignol accueillant le printemps ;
Chantera là-bas, mais ce ne sera pas pour moi.
Ce n’est pas pour moi que bruissent les ruisseaux,
S’écoulant en flots de diamant,
Là-bas, il y a une fille aux sourcils noirs,
Elle grandira, mais pas pour moi.
Ce n’est pas pour moi que viendra Pâque,
La parenté se rassemblant autour de la table,
Christ est ressuscité ! » des lèvres, se déversera,
Le jour de Pâque – ce n’est pas pour moi.
Ce n’est pas pour moi que fleurissent les fleurs,
Que la rose, sa couleur odorante, épanouira,
Tu cueilles une fleur, et elle se fane,
Cette sorte de vie n’est pas pour moi.
Pour moi, il y a un bout de plomb,
Il s’enfoncera dans mon corps blanc,
Et des larmes amères couleront :
Telle est la vie, frère, qui m’attend.
:
Le mot « Stengazeta » est un acronyme voulant dire « journal mural ». Stengazeta de Paris publie des traductions de chansons russes contemporaines et/ou populaires, ainsi que des articles d'opinions.
Il m’a semblé utile, de faire percevoir à travers ce blog, la Russie et ses cultures, hors du prisme propagandiste et réducteur que véhiculent les pouvoirs politiques, économiques & médiatiques occidentaux.
S. P Struve