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11 juillet 2009 6 11 /07 /juillet /2009 16:06

La romance « Tu fus balayée par les neiges, Russie », fut écrite par Philarète Tchernov en 1918, et publier dans le journal « Svoboda » la même année. Avec le temps et l’exile, elle devint « l’hymne non officiel de l’immigration russe ». Tchernov qui était resté en Russie, évitait pour cette raison, de trop rappeler qu’il en était l’auteur. Le peintre et poète, Evgueni Kropivnitski, connaissait Tchernov depuis son enfance. Il racontait qu’au début du XX° siècle, Tchernov était brusquement apparut dans le cercle de la famille Kropivnitski ; c’était un homme à cheveux longs, au caractère impétueux. Dans sa jeunesse, Tchernov avait rejoint un monastère, qu’il du, plus tard, quitter discrètement : Un malheur était arrivé ; Les moines s’étaient alcoolisés et Tchernov a dû saisir une hache… Kropivnitski ne se souvenait pas si Tchernov avait ou non tué quelqu’un, mais il du quitter très vite son monastère. Le poète était quelqu’un d’impressionnable. Un jour – racontait Evgueni Kropivnitski - du haut d’un balcon au premier étage d’une maison, il jeta son regard vers un ravin et s’écria en reculant – C’est sans fond ! Tchernov est mort après une énième beuverie.

plevitskaiaLa principale interprète de cette romance de Philaréte Tchernov, fut Nadezhda Plevitskaia née en 1884 dans le village de Vinnikovo dans la région de Koursk, de son nom de naissance, Vinnikova. Nadezhda Plevitskaia ne fit que deux classes à l’école paroissiale de son village avant de rejoindre un monastère où, par amour du chant, elle intégra le chœur et devint novice. Assistant un jour à une représentation d’un cirque embulant; conquise, elle s’enfuie avec les artistes de ce cirque. Plus tard, elle intégra "l’école de spectacles musicaux de Kiev" où elle rencontrera son premier mari, Edmond Plevitsky, un danseur polonais. Elle continuera à porter son nom jusqu'à sa mort.

Plevitskaia devient une chanteuse célèbre et se produit, dans des restaurants comme le « Yar » à Moscou. Elle chante devant la famille impériale ; Nicolas II l’appelle affectueusement « Notre rossignol russe »

Son deuxième mari est lieutenant. Lorsqu'éclate la première guerre mondiale, elle part au front avec lui et devient aide soignante dans un hôpital militaire de campagne. Le lieutenant périra héroïquement et Plevitskaia épousera peu de temps après un autre officier.

Commencent alors les temps troubles de la guerre civile où le nom de Nadezhda Plevitskaia ne fait surface qu’en raison de scandales dûs à ses nombreuses aventures sentimentales. Avec son nouveau lieutenant de mari, Youri Livitski, devenu commandant dans l’armée rouge, ils tombent aux mains des blancs. Elle doit être fusillée, mais un officier, le général Nicolas Skobline, la reconnait. Elle est emmenée au quartier général, où elle donne un concert.

Elle quittera la Russie par la Crimée avec l'armée du général Wrangel, vivant un temps en Turquie où elle épouse secrètement le général Skobline. Le couple finit par s’installer à Paris, où le jeune général (il était alors âgé de 27 ans et plus jeune de son épouse de huit ans) devient un activiste de la ROVS, (Union militaire de l'armée blanche en exil) organisation continuant à combattre le pouvoir soviétique de l’étranger.

Plevitskaia devient à nouveau une artiste connue, elle fait de nombreuses tournées à travers l’Europe et aux Etats-Unis. En 1926 Rachmaninov l’accompagne, lui-même, au piano. A cette époque ce n’est pas vraiment l’aisance matérielle qu’avait pu connaitre la chanteuse en Russie. Pourtant, le couple se retrouve en possession d’une belle demeure de deux étages, d’une voiture, il y a de plevitskaia2l’argent… Des bruis courent que le général et son épouse ont été recrutés par la Guépéou, mais lors d’un tribunal militaire d’honneur, le couple est lavé de tous soupçons. En réalité le général Skobline avait été recruté par l’Oguépéou dès 1930, après qu’il se soit adressée par courrier au gouvernement soviétique pour solliciter l’autorisation de retourner vivre en Russie avec son épouse.

Pour les « tchéquistes », la ROVS était alors l’une des principales menaces. Le Général Koutiépoff chef de l’organisation, avait déjà été enlevé par la Guépéou en plein Paris. Il arriva la même chose à son successeur, le général Miller. Le NKVD , mêla à cet enlèvement, le général Skobline et son épouse. Skobline s’étant enfui en Espagne, c’est seule, que Plévitskaia, en décembre 1938, fut traduite devant la justice française. Elle fut condamnée à 20 ans de bagne et mourut en octobre 40, dans l’indifférence générale, à la prison pour femme de la ville de Rennes.

Que reste-t-il de Plevitskaïa ? Quelques lignes dans l'Encyclopédie Soviétique, où, elle fut de ces, peu nombreux, émigrants russes, qui y figurèrent. Il reste les enregistrements de sa belle voix. Ses chansons... Dont les couplets de la romance de Tchernov qui, encore aujourd’hui, submergent l’âme d’une nostalgie infinie.

Voici donc un vidéogramme découvert sur le net où la belle voix de Plevitskaia interprète cette triste romance, L’auteur du clip, "Iris", a trouvé que ces photos de la Russie du début du XX° siècle accompagnaient particulièrement bien la romance chantée par Nadezhda Plevitskaïa

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Замело тебя снегом, Россия.
Tu fus balayée par les neiges, Russie.

Paroles & musique ; Philarète Tchernov

Tu fus balayée par les neiges, Russie,
Ensevelie sous une blanche tempête.
Et les vents froids des steppes,
Te recouvrent de chants funéraires.

Ni chemins, ni traces dans les plaines,
Le long des congères de neiges infinies.
Sans pouvoir parvenir aux reliques de l’enfance,
Sans pouvoir entendre les voix familières.

Balayant, balayant, tu as ensevelie
Tout ce qui est sacrée, chère tempête.
Tu es une force aveugle et cruelle,
Telle la mort, neiges, vous n’êtes pas vivantes.

Tu fus balayée par les neiges, Russie,
Ensevelie sous une blanche tempête.
Et les vents froids des steppes,
Te recouvrent de chants funéraires.

Traduction : Sarah P. Struve

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  • : Le mot « Stengazeta » est un acronyme voulant dire « journal mural ». Stengazeta de Paris publie des traductions de chansons russes contemporaines et/ou populaires, ainsi que des articles d'opinions. Il m’a semblé utile, de faire percevoir à travers ce blog, la Russie et ses cultures, hors du prisme propagandiste et réducteur que véhiculent les pouvoirs politiques, économiques & médiatiques occidentaux. S. P Struve
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